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Les Feuilles mortes, la pépite finlandaise du palmarès cannois 2023

Posté par Alexis Lebrun le 16 mai 2024

Prix du jury du dernier Festival de Cannes, le film d’Aki Kaurismäki était la Palme d’or de cœur de beaucoup de critiques sur la Croisette il y a un an. Il faut dire que le réalisateur finlandais met en scène dans Les Feuilles mortes l’une des plus belles histoires d’amour des dernières années. Chef-d’œuvre.

Un duo prolétaire

On a beaucoup lu – à juste titre – que Justine Triet filmait la désintégration du couple dans ANATOMIE D’UNE CHUTE. Mais on a beaucoup moins évoqué la présence dans le palmarès cannois 2023 d’un film qui raconte exactement l’inverse, soit la naissance mystérieuse du sentiment amoureux. Pas de panique, LES FEUILLES MORTES n’a rien d’une comédie romantique générique. La prouesse d’Aki Kaurismäki est de parvenir à toucher du doigt l’universel avec un film extrêmement personnel.

Le réalisateur et scénariste finlandais met en scène deux perdants du capitalisme, des âmes solitaires qui luttent au quotidien pour survivre en bas de l’échelle. Il y a d’abord Ansa (Alma Pöysti), une femme fliquée de près dans le supermarché où elle travaille, pour vérifier qu’elle ne « vole » pas… des produits périmés. Et puis il y a Holappa (Jussi Vatanen), un ouvrier du bâtiment qui se débat avec son alcoolisme.

Le minimalisme érigé en principe

Leur jeunesse est loin derrière eux et ils semblent avoir un peu perdu espoir en la vie, mais lors d’une soirée karaoké à Helsinki, au son de la pop mélancolique géniale du duo féminin Maustetytöt, le miracle se produit, au cours d’une scène minimaliste où tout l’esprit du film est résumé. Avec une économie extrême de mots et d’effets – quelques regards silencieux suffisent – Aki Kaurismäki rappelle ce qu’est l’étincelle de la première rencontre.

Mais tout le monde le sait, le premier pas est le plus difficile, et il l’est d’autant plus quand le désespoir a pris le pas sur toute confiance. Rien ne va donc aller de soi entre Ansa et Holappa : quand ils ne sont pas rattrapés par la dureté sociale du quotidien, c’est le hasard qui se charge de leur mettre des bâtons dans les roues. Mais LES FEUILLES MORTES n’est pas non plus un drame dénué d’espoir, et il réserve donc aussi de magnifiques scènes à ce couple naissant.

Un moment presque hors du temps

Celle où il va voir au cinéma THE DEAD DON'T DIE (2019) – le film de zombies de Jim Jarmusch – est un sommet de romantisme et d’humour pince-sans-rire, en plus de rendre hommage à de grands réalisateurs qui inspirent Aki Kaurismäki.

Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si Ansa recueille dans le film un chien errant promis à l’euthanasie, qu’elle renomme Chaplin. Et la scène finale est une magnifique référence à l’œuvre de Charlot, mais le réalisateur finlandais n’est pas écrasé par ses influences.

Outre sa science des dialogues laconiques – qui créent des répliques aussi drôles que tendres –, Kaurismäki est un maître dans l’art du cadrage. Il enchaîne les plans dignes de tableaux dans des décors là encore minimalistes mais en réalité extrêmement travaillés – notamment sur le plan des couleurs – et tournés en pellicule 35 mm.

Et si l’on excepte les informations diffusées à la radio, qui rappellent la tragédie en cours en Ukraine, LES FEUILLES MORTES est un film parfaitement hors du temps. Il est d’ores et déjà destiné à devenir un classique.

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