Comment Yannick a fait exploser la carrière de Raphaël Quenard
Succès surprise de l’année 2023, la comédie à huis clos de Quentin Dupieux a littéralement propulsé sur le devant de la scène un acteur jusque-là plutôt habitué aux seconds rôles. Mais Yannick n’est probablement que le premier acte de l’histoire d’amour entre Raphaël Quenard, le cinéma français et son public.
Comme son personnage dans YANNICK, il a fait irruption sans prévenir dans le petit monde du cinéma d’auteur. Dans le film de Quentin Dupieux, Raphaël Quenard se lève en effet soudainement de sa place de spectateur pour interpeller vertement les comédiens d’une pièce de théâtre peu inspirée. Ces derniers sont comme le grand public dans les salles de cinéma : sonnés par cet étrange personnage à la diction chaloupée et à la voix unique en son genre.
Raphaël Quenard a une tchatche hors du commun, et il semblait donc né pour faire briller les dialogues si particuliers de Quentin Dupieux, qui lui avait déjà donné sa chance dans deux scènes hilarantes de MANDIBULES (2020) et FUMER FAIT TOUSSER (2022), et qui a imaginé pour lui ce personnage de gardien de parking hermétique à la convention sociale qui veut que l’on ne pipe surtout pas mot pendant une représentation théâtrale.
Mais Yannick va encore plus loin : non seulement il interrompt le cours de la pièce, mais face aux réactions outrées des comédiens sur scène (joués par Pio Marmaï, Blanche Gardin et Sébastien Chassagne), il revient prendre en otage toute la salle avec une arme.
C’est le point de départ d’un huis clos totalement absurde et malaisant, dans la plus pure tradition du cinéma de Quentin Dupieux, même si celui-ci se double cette fois d’une charge politique inédite, puisque le film semble interroger les rapports de classe entre la France parisienne dite des élites (culturelles, sociales et économiques) et celle des périphéries, d’où est originaire Yannick – qui met en exergue son long trajet depuis « Melun dans le 77 ».
Dans ce rôle assez fou qui lui demande d’enchaîner les monologues, Raphaël Quenard semble jouer sur du velours, et il parvient à être tour à tour touchant, exaspérant, inquiétant et surtout authentiquement humain.
C’est sûrement pour cette raison que le public s’est tout de suite pris de passion pour cet acteur qui détonne dans le paysage du cinéma français – il ne vient pas du sérail – mais qui y est déjà reconnu : nommé trois fois aux César cette année – dont meilleur acteur pour Yannick –, Raphaël Quenard a remporté celui de la révélation masculine pour CHIEN DE LA CASSE, un autre film phénomène où il interprète encore un marginal mémorable.
Nul doute que sa palette devrait bientôt s’étendre : rien qu’en 2023, il était à l’affiche de sept films. Vous avez dit coqueluche ?