La Passion de Dodin Bouffant : Juliette Binoche et Benoît Magimel nous mettent l’eau à la bouche
Récompensé par le prix de la mise en scène au dernier Festival de Cannes, ce film de Trần Anh Hùng réunit les deux monuments du cinéma français pour la première fois depuis près de 25 ans. Et cela valait la peine d’attendre, car La Passion de Dodin Bouffant est l’hommage goûtu que la gastronomie française méritait.
S’il est courant d’affirmer qu’il ne faut jamais faire ses courses lorsque l’on a faim, on peut désormais ajouter qu’il vaut mieux avoir le ventre plein pour regarder LA PASSION DE DODIN BOUFFANT, tant le septième long-métrage de Trần Anh Hùng a le pouvoir de faire intensément saliver dès ses premières minutes.
On y assiste en effet à la préparation lente et minutieuse d’une multitude de plats très élaborés dans une cuisine de la fin du 19ème siècle, où un gastronome nommé Dodin Bouffant (Benoît Magimel) et sa cuisinière surdouée Eugénie (Juliette Binoche) s’affairent pour le plaisir de leurs convives.
La caméra virevolte entre les casseroles et nous immerge dans ce cinéma sensoriel où un travail remarquable a notamment été réalisé sur le son. Le bouillonnement et le crépitement des aliments sont tels que l’on jurerait presque pouvoir sentir ces derniers.
Et que dire de la photographie – nommée aux derniers César –, qui capte ce ballet étourdissant sous une superbe lumière dorée de fin de journée ? Bref, rien n’a été laissé au hasard dans cette cuisine, où le chef étoilé Pierre Gagnaire a supervisé tous les plats du film, en plus d’y faire une petite apparition.
Mais LA PASSION DE DODIN BOUFFANT n’est pas qu’un délice pour les yeux. C’est aussi une grande histoire d’amour contrariée entre deux personnages qui préfèrent exprimer leurs sentiments par la gastronomie – il faut rappeler que le film est adapté d’un roman de Marcel Rouff publié en 1924.
C’est aussi l’occasion pour Juliette Binoche et Benoît Magimel de se retrouver à l’écran pour la première fois depuis LES ENFANTS DU SIÈCLE (Diane Kurys, 1999), un autre film d’époque costumé.
Leurs retrouvailles sont d’autant plus touchantes qu’ils ont vécu ensemble pendant plusieurs années suite à ce tournage, avant de se séparer. À leurs côtés, on a aussi le plaisir de reconnaître l’étoile montante Galatéa Bellugi, nommée cette année aux César pour la sensation CHIEN DE LA CASSE (Jean-Baptiste Durand, 2023). Son personnage de servante qui a des montagnes de vaisselle à faire est devenu une des mascottes du film aux Etats-Unis, où LA PASSION DE DODIN BOUFFANT a enchanté les critiques. Rappelons que LA PASSION DE DODIN BOUFFANT a été sélectionné pour représenter la France aux Oscars.
La preuve qu’il n’y a pas qu’ANATOMIE D’UNE CHUTE (Justine Triet, 2023) dans la vie, et que la gastronomie française reste une puissante arme de séduction à l’étranger – le titre initial était THE POT-AU-FEU... Elle a rarement été aussi bien mise en valeur que dans le film de Trần Anh Hùng, mais on préfère s’arrêter là : il est l’heure de passer à table.