Pourquoi il faut voir La Fièvre, la nouvelle série du créateur de Baron Noir
Après avoir disséqué le petit monde politique dans la série mettant en scène Kad Merad, Eric Benzekri s’attaque cette fois à la planète football et à la société française dans son ensemble. ''La Fièvre '' est incontestablement l’une des séries les plus bouillantes de l’année, et voici pourquoi.
La Fièvre porte bien son nom. Ses six épisodes ne laissent aucun répit et multiplient les rebondissements à un rythme effréné, et cela commence dès les premières minutes. Lors de la cérémonie de remise des trophées de fin de saison, un des meilleurs joueurs du championnat de France inflige un coup de tête à son entraîneur en pleine retransmission télé avant de l’insulter de « sale toubab » et de prendre la fuite en voiture.
À partir de là, un engrenage infernal se met en place pour le joueur et son club, qui se retrouvent au milieu d’un tourbillon médiatique et politique sans précédent. Tout un pays enfiévré menace de s’embraser, et on ne peut que s’accrocher à notre siège.
Pour se sortir de ce bourbier, le joueur incriminé (nommé Fodé Thiam) et son club n’ont pas d’autre choix que de faire appel aux services d’une agence spécialisée en communication de crise.
C’est là que travaille Sam, une « spin doctor » redoutablement intelligente mais aussi terriblement hantée par l’état de la société. Malgré les réticences de son patron, c’est elle qui prend en charge l’affaire Fodé Thiam.
L’occasion pour nous de découvrir l’envers du décor de la communication de crise, à l’heure de l’omniprésence des réseaux sociaux, des chaînes d’info en continu et de la polarisation des débats dans tous ces médias, où chacun déforme les mots et les images à son profit.
La Fièvre n’est pas une série sur le foot à proprement parler, mais elle offre un regard singulier sur le sport le plus populaire de France, le dernier à rassembler toutes les classes.
Fodé Thiam est en effet un joueur important de l’Equipe de France, et la série prend place à quelques mois de l’Euro, ce qui signifie que les enjeux liés à la sélection nationale se superposent aux autres. Un joueur qui a donné un coup de boule à son entraîneur peut-il porter le maillot bleu ?
On ne spoilera pas la réponse, mais on peut dire que la série nous fait visiter Clairefontaine, et qu’on y voit un sélectionneur et un président de fédé confrontés à une grosse pression médiatique. Toute ressemblance avec la réalité…
On l’a dit, le créateur et scénariste de La Fièvre n’est pas un nouveau venu. Eric Benzekri a été pendant trois saisons la tête pensante de Baron Noir, l’une des meilleures séries politiques des dernières années.
Cet ancien travailleur de la gauche est reconnu comme observateur avisé des débats qui agitent la société française, et il a décidé cette fois de s’intéresser aux tensions identitaires.
Et il le fait encore avec beaucoup de justesse et de finesse via le personnage de Marie Kinsky, une comédienne et polémiste d’extrême-droite qui profite de l’affaire Thiam pour cliver au maximum la société et la rapprocher de la guerre civile que craint son ancienne collègue et amie Sam (voir plus haut).
On retrouve enfin dans La Fièvre un certain nombre de visages en vogue du cinéma français, à commencer par Nina Meurisse (Sam), l’actrice révélée en 2019 dans le rôle de Camille Lepage et bouleversante dans Petite Maman (2021) de Céline Sciamma.
Sa rivale dans la série (Marie) est jouée par une Ana Girardot totalement flippante dans un rôle dramatique aux antipodes de son personnage d’Anne dans La Flamme et Le Flambeau.
On reconnaît aussi Alassane Diong (Tirailleurs, Les Sauvages) dans le rôle de Fodé, et un Benjamin Biolay à l’aise dans la peau du président de club, un rôle taillé sur mesure pour celui dont on connaît la passion pour le football.
La Fièvre épisodes 1 à 6, diffusés à partir du 18 mars sur CANAL+.