Le cinéma du Père Noël
Cher papa Noël, je m’appelle Laura, j’ai 11 ans et un petit frère qui lui a 8 ans. Avec ma famille, nous voudrions aller au cinéma pendant les vacances de Noël mais je ne sais pas quel film aller voir pour plaire à toute la famille.
Bonjour Laura, je vois que tu aimes le cinéma et je t’avoue que moi aussi, après une longue journée à fabriquer des cadeaux en tous genres, j’aime beaucoup prendre les rênes de mes rennes pour aller au cinéma le plus proche de chez moi, même s’il y en a peu en Laponie.
Je pense pouvoir te conseiller pour ta famille, ton petit frère et toi, « Tous en scène 2 » qui devrait convenir à tous les âges. Peut-être avais-tu déjà vu le premier « Tous en scène », sorti il y a 4 ans, qui racontait les aventures d’un Koala, Mister Moon, qui réunissait toutes sortes d’animaux chanteurs pour sauver sa salle de spectacle de la faillite ? Hé bien, figure-toi qu’une suite sort ce 22 décembre dans les salles et que c’est toujours aussi drôle, dansant et réussi.
Son réalisateur, l’anglais Garth Jennings, nous raconte pourquoi il a fait ce deuxième épisode :
« Dans mon souvenir, on a commencé à parler de faire une suite à « Tous en scène » environ un an après que l’on a eu fini celui-ci. On en discutait sans idée précise autour d’une tasse de café et on se disait « Est-ce que ce ne serait pas chouette d’essayer d’aller plus loin ? Est-ce que ce ne serait pas intéressant que ces personnages poursuivent leur voyage ? » Ils n’avaient fait que découvrir leur potentiel. C’est à la fin du film que leur histoire commençait en fait. Notre idée était de poursuivre le récit et de leur permettre d’être à la hauteur de leurs ambitions, de leurs compétences et de leur talent. »
J’imagine, Laura, que tu vis en France. Tu peux alors chanter un petit cocorico car ce dessin animé a été réalisé dans ton pays dans un studio d’animation très connu pour avoir réalisé les films « Moi, moche et méchant » et les « Minions ». Tu vois il n’y a pas que les studios Disney qui font des films d’animation. Ce studio s’appelle Illumination. Garth Jennings m’en a un peu parlé :
« Ce qui est super avec les studios Illumination c’est qu’ils sont ici en Europe et qu’ils regroupent des talents du monde entier. Il y a en France une super école d’animation, Les Gobelins. Il y émerge des talents extraordinaires qui peuvent trouver leur place dans un studio comme celui-ci. Ce n’est pas d’ailleurs le seul studio d’animation en France, il y en a plein. Mais Illumination, c’est un immense studio. Je trouve ça génial que l’animation puisse se développer partout. »
Dans “Tous en scène 2”, tu retrouveras beaucoup des personnages du premier épisode, mais même si tu ne l’avais pas vu, tu comprendras facilement l’histoire et tu t’attacheras aux péripéties de tous ces animaux courageux dont le réalisateur Garth Jennings est modestement fier :
« Ce que je souhaite par-dessus tout, et c’est la motivation que j’avais en réalisant ce film (même si ce n’est pas la seule), c’est que l’on ressorte de la salle de cinéma comme si le film vivait encore en nous. On ressent une joie à suivre ces personnages dans leurs aventures et j’espère que cela sera partagé par les spectateurs qui iront le voir. C’est mon intention première, c’est ce que je recherche personnellement en allant voir un film, en sortir plus heureux. Il y a des messages bien sûr qui sont véhiculés : celui de prendre conscience du potentiel que l’on possède tous. Pensez au nombre de fois que des gens vous assurent que vous ne pouvez pas faire quelque chose alors que vous, vous pensez le contraire ! Vous voyez ce que je veux dire. Mais je crois que c’est plutôt au public de dire quel message en tirer plutôt qu’à moi. »
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Cela fait bien longtemps que je ne crois plus au père Noël mais j’écris ce message à tout hasard. J’ai 15 ans, je m’appelle Sophie, et je voudrais savoir quel film je peux aller voir pendant les vacances avec mes copines. Une idée ?
Chère Sophie, à ton âge, il est normal d’avoir des doutes sur mon existence. Mais tu vois, j’ai reçu ton email et j’y réponds, c’est donc que je suis bel et bien réel. Chacun ses croyances après tout. Tu utilises internet et sûrement joues-tu à des jeux vidéo en réseau. Dans beaucoup de ceux-ci nous nous créons des personnages inventés, que l’on appelle des « avatars ». L’anime « Belle » du réalisateur japonais Mamoru Hosoda devrait te parler alors. « Belle », c’est l’adaptation dans le monde d’aujourd’hui du conte de Charles Perrault, « La Belle et la bête », qui a déjà été plusieurs fois l’objet de films. Tu vas te dire que c’est une histoire pour les « bébés », mais pas du tout. Cela parle vraiment de l’adolescence, comme Mamoru Hosoda me l’a confié.
« Dans le cinéma en général, on essaye de créer des personnages qui font un peu rêver et qui sont destinés à consoler les spectateurs. Ce sont des personnages idéalisés, bien loin de la réalité. Ce n’est pas mon cas. J’essaye de montrer la réalité telle qu’elle est dans notre monde et surtout comment les gens arrivent à surmonter les obstacles. Dans « Belle », le personnage de Suzu est une jeune fille extrêmement timide, qui n’est pas sûre d’elle. Elle n’ose pas faire des choses sous le regard des autres. C’est en tout cas quelqu’un qui se sent oppressé. Elle est assez représentative de la jeune génération d’aujourd’hui. Les jeunes se sentent pris dans le carcan de la société, une société dans laquelle ils ne se sentent pas vraiment libre d’être eux-mêmes. Ce que l’on remarque de plus en plus dans les écoles, ce sont des élèves qui parviennent mal à s’intégrer et qui finissent par se renfermer sur eux-mêmes. Pour autant, est-ce que ces jeunes-là n’ont pas de personnalité ou d’intérêt ? Je ne le crois pas. Ils sont aussi intéressants que les autres. Simplement il y a des facettes d’eux que l’on ne connaît pas. Ils sont souvent très talentueux avec beaucoup de qualités, et là, le personnage de « Belle » dans le film arrive à montrer tout son potentiel dans le monde virtuel de U. C’est par son avatar que la jeune fille, Suzu, dans sa vraie vie, va être encouragée à oser accomplir des choses. »
Dans Belle, @louane prête sa voix à l'héroïne et c'est pour notre plus grand plaisir 🥰
— CANAL+ Cinéma (@CanalplusCinema) December 6, 2021
👉 @lauriecholewa pic.twitter.com/TdoYzvUxfa
Ce n’est pas la première fois que Mamoru Hosoda met en scène des personnages transformés en animaux. C’est un thème qui lui est cher puisqu’il a réalisé en 2012 « Les enfants Loups, Ame & Yuki » et « Le Garçon et la Bête » en 2015.
« J’ai toujours aimé « La Belle et la bête » et ce que j’aime dans cette histoire c’est que les rôles sont renversés et les notions de valeur sont renversés, c’est-à-dire que le personnage considéré comme laid finit par être considéré comme beau à la fin du film. Ce renversement me plaisait beaucoup. Dans ma version de « La Belle et La bête », donc dans mon film « Belle », j’ai gardé ça. Mais l’œuvre originale rend compte du XVIIIème siècle en France, il faut regarder le contexte dans lequel cette histoire a été écrite, dans un monde encore un peu féodal et dans le contexte d’une forte influence du patriarcat : les femmes étaient considérées comme valant moins que les hommes et elles ne pouvaient pas faire ce qu’elles voulaient. Donc la définition d’une « belle » femme à l’époque, c’était extrêmement simple, il fallait juste être belle physiquement parlant. J’ai voulu moderniser ce propos pour que cela corresponde à notre époque où la définition de ce qu’est une belle femme a beaucoup changé. Cette considération de « belle femme » était définie par le regard des hommes. Ici ce sont les femmes elles-mêmes qui décident et qui se montrent fortes. Je pense que c’est ça qui caractérise une « belle femme » aujourd’hui ».
Ce film d’animation devrait aussi te plaire pour sa beauté esthétique. Il mélange la tradition des dessins animés en 2D et l’animation en 3D, c’est-à-dire assistée par ordinateur, ce qui permet beaucoup plus de possibilités. « Belle » est en salle à partir du 29 décembre. Si tu es fan de l’actrice et chanteuse Louane, c’est elle qui fait la voix française de l’héroïne et de son avatar Belle qui chante magnifiquement.
Autrement je peux te proposer un autre film d’animation, mais c’est un sujet plus difficile. Il s’agit du film « Où est Anne Frank ! » de l’Israélien Ari Folman. As-tu étudié en classe « Le journal d’Anne Frank » ? Anne Frank était une jeune adolescente juive qui vivait à Amsterdam, aux Pays-Bas, pendant la seconde guerre mondiale. Tu sais qu’à cette époque, les personnes juives étaient persécutées par les nazis et même que beaucoup ont été tuées parce qu’elles étaient juives. On appelle ça un génocide. Anne Frank n’était probablement pas très différente de l’adolescente que tu es, mais le journal intime qu’elle a tenu alors qu’elle vivait cachée dans un grenier avec sa famille, est devenu depuis très célèbre. C’est un document historique majeur.
Dans « Où est Anne Frank ! », on nous raconte de nouveau cette histoire mais à partir de personnages d’aujourd’hui. Kitty, l’héroïne du film, c’est l’amie imaginaire à qui écrivait Anne Frank dans son journal. Ari Folman nous propose de croire que ce personnage fictif sort du journal comme par magie et qu’elle découvre avec tout un tas de personnes qu’elle rencontre, ce qui suit le journal d’Anne Frank, ce qu’elle est devenue après, puisque celui-ci est resté inachevé. Ari Folman réfléchit à ce qui a le plus de valeur : le journal lui-même, exposé dans une vitrine d’un musée, ou bien le message qu’il évoque ? Il établit un parallèle entre la situation aujourd’hui des migrants qui ont quitté leurs pays en guerre et qui parfois (souvent) vivent sans autorisation dans un pays d’Europe. Ce n’est bien sûr pas la même chose qu’un génocide car il n’y a pas d’intention délibérée de tuer ces gens, mais par contre, ces migrants doivent vivre dans la clandestinité comme Anne Frank dans son grenier, sous peine d’être renvoyés dans leur pays d’origine où là, ils peuvent être victimes de la guerre. C’est un film qui donne à penser et qui lui aussi est très beau visuellement. Plutôt que de le voir avec des copines, je te recommande de le voir avec un adulte pour pouvoir ensuite en discuter. « Où est Anne Frank ! » est sorti en salle le 8 décembre.
Voilà Sophie, je dois à présent retourner dans mon atelier, car mes lutins font souvent des bêtises et il faut toujours que j’ai un œil sur eux.
Passe de bonnes vacances de Noël et n’hésite pas à m’écrire de nouveau si tu as besoin de conseils cinématographiques.
Signé : Père Noël