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Patrick Melrose : Benedict Cumberbatch nous en dit plus sur le personnage toxicomane et alcoolique qu’il incarne

Posté par Alizee Guigliarelli le 6 mars 2019

Benedict Cumberbatch, alias Patrick Melrose, crève l’écran dans cette série très noire, héros d’un combat quotidien contre un passé familial destructeur, doublé d’addiction aux drogues dures. Son chemin vers la rédemption est tracé par le scénariste David Nicholls qui adapte ici les romans de l’écrivain anglais Edward St Aubyn, sous la houlette d’Edward à la réalisation.

Acteur central et Producteur exécutif de la série adaptée du roman d'Edward Saint Aubyn, Benedict Cumberbatch nous parle de la genèse de cette série hors du commun, à découvrir le 25 mars sur CANAL+ et en intégralité sur myCANAL.

COMMENT AVEZ-VOUS REJOINT LA SÉRIE ?

Michael Jackson et Rachael Horovitz, qui possédaient les droits sur la série de romans Patrick Melrose d’Edward St Aubyn, sont venus me trouver. Je savais qu’un bon paquet d’acteurs avaient dû lire ces livres en se disant : " Hmm, ça me dirait bien. " J’ai simplement eu énormément de chance d’être au bon endroit au bon moment. J’ai exprimé mon envie sur le forum Reddit et ils m’ont appelé ! Ils voulaient me rencontrer quand je serais à New York.

On s’est retrouvés pour un petit déjeuner. J’étais légèrement en retard et mort de trac, je m’étais dépêché de relire les deux derniers romans la veille au soir et le matin même du rendez-vous ! Je n’avais pas percuté qu’à ce moment-là ils n’avaient que moi en tête pour le rôle et j’étais donc très nerveux alors qu’eux, de leur côté, étaient tout simplement en train de me pitcher leurs idées sur l’adaptation télévisée de ces romans géniaux.

COMMENT DÉCRIRIEZ-VOUS PATRICK MELROSE ?

Patrick est un personnage qui cherche désespérément à prendre ses distances par rapport à une enfance très difficile, d’où un grand désordre psychologique. Il est toxicomane, a des tendances suicidaires, mais c’est aussi quelqu’un d’incroyablement drôle et de brillant. Tout tourne autour d’un monde que j’avais l’impression de connaître, mais présenté sous un certain angle et complètement subverti par le point de vue de ce personnage très particulier. Il souffre énormément mais va s’embarquer dans une aventure extraordinaire, qui va le faire passer du statut de victime à celui de survivant. C’est une sorte de triomphe sur l’adversité. Une autopsie aussi hilarante que féroce d’un système de classes en pleine déliquescence, un pouvoir qui se délite à mesure que l’histoire avance. C’est une extraordinaire tranche de vie. C’est très intéressant de voir le personnage évoluer d’un enfant innocent à un jeune homme terrifié et autodestructeur, puis un trentenaire assagi, un mari, un père, un orphelin… quel formidable trame pour un acteur !

 

VOUS N’AVEZ PAS EU BEAUCOUP DE SCÈNES AVEC HUGO WEAVING, QUI JOUE LE RÔLE DE VOTRE PÈRE ?

Hélas, non. Et pourtant je l’adore. Il a un talent fou et il est absolument extraordinaire dans ce rôle : celui d’un homme charismatique, effrayant, avec une très forte présence, mais une âme torturée qui torture en retour. Ce qu’il fait subir à Patrick est quelque chose d’assez cataclysmique. On devine qu’il a été brisé dans son enfance. Hugo s’est jeté à corps perdu dans son rôle, mais dans la vraie vie, c’est l’homme le plus charmant, le plus doux et le plus drôle qui soit. Je pense que de tous les acteurs, c’est celui que l’équipe technique a le plus apprécié.

ET JENNIFER JASON LEIGH, QUI INCARNE LA MÈRE ?

J’ai surtout travaillé avec elle dans son rôle d’Eleanor âgée et elle a été formidable. La transformation était assez extraordinaire, tout comme sa performance. Je n’ai pas eu l’occasion de jouer avec elle dans la phase plus jeune du rôle, mais j’ai visionné les rushes quand j’étais à Atlanta pour mon rôle de Doctor Strange dans AVENGERS. Elle est très audacieuse dans ses choix et comme ceux-ci reposent sur quelque chose de profond, le rendu à l’écran est magnifique. C’est une actrice absolument remarquable à observer en action. Pip Torrens a été extraordinaire de bout en bout dans le rôle de Nicholas Pratt. C’est un homme qui possède l’armure d’un prédateur social apparemment invincible, avec tous ses bons mots et son esprit, mais qui, sans rien spoiler, finit par montrer sa vulnérabilité et vous fend le coeur. Holliday Grainger est captivante dans son rôle de jeune hippie accro à la fumette et rebelle, qui va finir par prendre le parti de l’establishment et du matérialisme. La voir jouer est une vraie master class !

Prasanna Puwanarajah, un ami avec qui je n’avais pas travaillé depuis longtemps, joue le rôle de Johnny. Avec Anna Madeley, ma femme à l’écran, on se connaît depuis le tournage de THE CHILD IN TIME : elle s’est imposée comme une évidence. Elle est absolument extraordinaire dans le rôle de Mary, la femme tristement dévouée de Patrick. C’est un rôle difficile, qu’elle fait évoluer de façon magnifique, avec énormément de force et d’émotion. Quant à la fantastique Jessica Raine, elle joue le rôle de Julia, cette femme merveilleusement hargneuse, amie de longue date de Patrick, voire un peu plus. Elle va passer du détachement plein d’ironie à la dépression et son interprétation est impeccable. Vous allez voir que les femmes de cette série sont époustouflantes.

VOTRE RÔLE VOUS A-T-IL POSÉ DES DIFFICULTÉS DU FAIT DES SUJETS ABORDÉS ?

Le plus difficile a été de contenir toute cette douleur et ce chagrin, et d’arriver à un état où ce ne sont plus que les seuls sentiments qui l’animent, ce qui le fait basculer dans un comportement chaotique et autodestructeur, et il finit par s’effondrer lors des funérailles de sa mère. Certaines des scènes tournées dans la chambre d’hôtel, dans l’épisode Bad News, sont assez dures. C’est un peu comme un one-man-show, quand il se met à tout casser dans la chambre, avec des voix de schizophrènes qui s’élèvent et commencent à dialoguer les unes avec les autres. Il fallait que je me parle à moi-même. Ça restera comme une journée de travail un peu éprouvante ! J’ai eu de nombreuses occasions d’apprendre à faire la part des choses et donc de quitter le plateau, prendre la voiture pour rentrer chez moi, allumer l’autoradio et commencer à décompresser, si bien que quand j’arrive, ce n’est pas : « Tu as passé une bonne journée ? » « Oui, j’ai vu mon père mort, je me suis souvenu de quand il me violait, puis je me suis fait un petit shoot de coke dans la cheville gauche et j’ai saccagé ma chambre d’hôtel avant de frôler une overdose d’héroïne et de me réveiller dans une mare de sang, de vomi et d’aiguilles. La routine, quoi ! »

ALORS À QUOI PEUT-ON S’ATTENDRE ?

J’ai horreur de cette question parce que vous me demandez de vendre ma série et ce n’est pas évident, mais… je dirais que les gens vont passer un bon moment et être surpris. J’espère qu’ils auront vraiment plaisir à voir cette histoire extraordinaire interprétée par quelques uns de nos acteurs les plus appréciés, jeunes et moins jeunes, et filmée de façon innovante et splendide. Visuellement, le style évolue à chaque épisode et le scénario est évidemment très original. J’espère que cela donnera aux gens l’envie de découvrir les livres. Je me souviens que quand on a fait Sherlock, ces romans ont vu leurs ventes décoller, et une nouvelle génération a redécouvert Conan Doyle. Les romans Patrick Melrose sont un chef d’oeuvre de la littérature du 21è siècle. Ils résisteront à l’épreuve du temps. Espérons que notre adaptation en fera autant !