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HOUSE OF GUCCI, la tragicomédie baroque de Ridley Scott

Posté par Alexis Lebrun le 3 juin 2022

En 45 ans de carrière, le réalisateur britannique a tout connu. Volontairement ou non, il s’est fait une spécialité de cliver le public et la critique, et son dernier projet en date ne déroge pas à la règle. Fresque burlesque au parfum sulfureux, HOUSE OF GUCCI est le film de tous les excès, porté par un casting insensé.

« Au nom du père, du fils et de la maison Gucci »

Quand on lit l’histoire de la famille Gucci dans le livre éponyme publié par Sara Gay Forden en 2000, on comprend pourquoi Ridley Scott en a acheté les droits d’adaptation dès le début du millénaire. Cette sale histoire de famille où se mêlent dans des proportions démesurées l’argent, le pouvoir, l’ambition, la trahison, le scandale, la vengeance, la décadence et même le meurtre est du pain béni pour le cinéma. Encore faut-il avoir les moyens de réunir un casting à la hauteur, capable d’incarner des personnages parfois si extravagants qu’on peine à croire qu’ils existent vraiment. C’est exactement ce qu’a fait Ridley Scott, en confiant le rôle principal de Patrizia Reggiani à Lady Gaga, dont la prestation travaillée de façon obsessionnelle pendant des mois (cet accent italien !) a été inexplicablement snobée par les Oscars – qui en sont pourtant friands habituellement. Dans la famille Gucci aussi, Patrizia Reggiani a été snobée.

Lorsqu’elle met le grappin sur l’un des héritiers de Gucci, Maurizio (Adam Driver), on ne manque jamais l’occasion de lui rappeler d’où elle vient. Peu lui importe : Patrizia épouse Maurizio et l’incite à s’imposer dans la famille pour devenir le nouveau patron de la maison au détriment des autres membres de la famille, son oncle Aldo (Al Pacino) et son cousin Paolo , personnalité complètement fantasque qui a de grandes ambitions artistiques mais pas beaucoup de talent, et qui est ici joué par un Jared Leto grand-guignolesque et méconnaissable derrière des prothèses impressionnantes (le film a été nommé aux Oscars pour les meilleurs maquillages et coiffures). Ce casting de fou furieux est complété par un autre acteur génial : Jeremy Irons, qui incarne Rodolfo, le père de Maurizio. Et outre la présence de Salma Hayek (femme du patron de la société qui possède aujourd’hui Gucci), on ne résiste pas non plus au plaisir d’évoquer l'apparition de notre Camille Cottin nationale dans le rôle de Paola Franchi.

Ridley Scott, un octogénaire stakhanoviste du cinéma

On l’a dit en introduction, HOUSE OF GUCCI est un film qui ne fait pas l’unanimité, mais c’est justement parce qu’il est clivant qu’il est intéressant. Il relate des événement tragiques – on préfère taire l’épilogue de l’histoire – et ressemble pourtant bien davantage à une farce volontairement kitsch qui tourne en ridicule un monde d’une vulgarité abyssale (mais qui offre au long-métrage des décors et des costumes d'un cliquant époustouflant). On se demande d’ailleurs bien quel genre de publicité Gucci espérait tirer de ce spectacle sorti au cinéma pour le centenaire de la marque. Et personne n’a été surpris d’apprendre qu’après avoir vu le film, les héritiers de Gucci ont condamné publiquement la manière dont la famille est présentée par Ridley Scott, avant de menacer de déposer une plainte.

Voilà une controverse qui ne risque pas d’inquiéter le réalisateur octogénaire, habitué au parfum des polémiques depuis ses débuts il y a 45 ans. Ses fans se déchirent encore sur la postérité de ses deux derniers films dans la saga ALIEN, PROMETHEUS (2012) et CONVENANT (2017) et plus globalement, le Britannique est depuis longtemps réputé pour les hauts (ALIEN en 1979, BLADE RUNNER en 1982, THELMA ET LOUISE en 1991) et les bas (1492 : CHRISTOPHE COLOMB en 1992) de sa très riche filmographie. Une irrégularité qui s’explique aussi par le fait qu’il continue d’enchaîner les tournages à un rythme impressionnant. Quelques semaines avant HOUSE OF GUCCI, il a en effet sorti LE DERNIER DUEL, l’un des meilleurs films de l’année, pourtant passé complètement inaperçu auprès du public. Il sera disponible dans quelques semaines sur CANAL+ et nous aurons donc l’occasion de revenir longuement sur cette énième injustice faite à l’un des plus grands réalisateurs vivants aujourd'hui.

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