"Uderzo, sur le divan d'Astérix", un doc exceptionnel sur le papa du plus célèbre des Gaulois
À l’occasion de la diffusion du film de Guillaume Canet, "Astérix et Obélix : L'Empire du Milieu", CANAL+ propose une Création Documentaire inédite sur la vie et l’œuvre du dessinateur devenu scénariste de la bande-dessinée sexagénaire de tous les records. Et pour retracer le très riche parcours d’Albert Uderzo, le réalisateur Yannick Saillet a réuni un casting royal, avec Antoine de Caunes en chef d’orchestre.
Décédé à 92 ans en mars 2020, il a consacré plus de la moitié de sa vie aux aventures d’Astérix et Obélix. Car après la mort prématurée du scénariste René Goscinny en 1977, Albert Uderzo se retrouve à devoir le remplacer au pied levé pour continuer d’écrire l’histoire des irréductibles Gaulois de la BD. C’est par cette période que commence le documentaire, ce qui permet de mieux comprendre la relation qui unissait les deux créateurs d’Astérix.
Leurs filles respectives (Sylvie Uderzo et Anne Goscinny) décrivent deux êtres inséparables qui n’étaient pas collègues mais les meilleurs amis du monde, malgré des caractères très différents. Est-ce parce qu’ils étaient tous les deux issus de l’immigration qu’ils avaient cette vision si décalée et juste la France dans les albums d’Astérix ?
Certains témoins avancent cette hypothèse très pertinente. Le récit de l’enfance d’Uderzo est d’ailleurs passionnant : grâce à de très nombreuses archives, on découvre la famille italienne dont il est issu, et avec qui il a notamment vécu rue de Montreuil à Paris, où il a appris à dessiner en autodidacte, face à un miroir. Ses proches rappellent qu’il n’est pourtant pas parti avec les meilleures cartes, puisqu’il est né avec douze doigts – il a été opéré jeune – et était daltonien...
Mais il a aussi beaucoup de talent, et la création du magazine Pilote en 1959 lui donne l’occasion de le montrer à un très large public. Dans de savoureuses archives, il raconte aux côtés de Goscinny comment ils ont donné naissance à Astérix, qu’Uderzo imaginait plutôt avec un physique de super-héros, avant que son compère n’insiste pour le rendre plus petit et moins beau.
Leur collaboration sera très fructueuse, avec 24 albums imaginés ensemble et un carton partout dans le monde. Un succès qui crée des convoitises : le documentaire n’occulte pas la bataille juridique menée par Uderzo à partir de 1977 face à l’éditeur Dargaud, qui lésait clairement les deux auteurs. Ses proches racontent aussi dans le film sa longue dépression après le drame de la mort de Goscinny la même année.
Ils rappellent qu’à l’époque, les médias enterrent Astérix avec son scénariste. Une double-peine qu’Uderzo refusera finalement en reprenant le flambeau, même si son écriture a été critiquée au fil des années. Avec le recul, Zep laisse penser face à la caméra qu’on a sans doute été trop durs avec celui qui reste par ailleurs un incroyable dessinateur.
Ses pairs comme Virginie Augustin, David Lloyd (V pour Vendetta), Geoff Johns (DC Comics) expliquent aussi bien à quel point Uderzo n’avait pas son pareil pour créer du mouvement dans ses planches, et Alain Chabat lui-même vient dire son admiration pour la manière dont il mêlait la caricature à un style plus réaliste dans son trait. Le réalisateur du meilleur film adapté des aventures d’Astérix (Mission Cléopâtre en 2002) vient témoigner de son lien très fort avec l’œuvre d’Uderzo, et il n’est pas le seul.
Alexandre Astier explique aussi comment il a réussi à le convaincre du scénario d’Astérix : Le Secret de la potion magique (2018), tandis que Guillaume Canet décrit avec pas mal d’humour le stress intense qu’il ressentait lorsqu’il a présenté son projet au maître. Après s’être disputé en justice avec sa fille Sylvie sur l’avenir d’Astérix, celui-ci a heureusement fini par se réconcilier avec elle avant sa mort.
Fragilisé par des douleurs dans la main, Uderzo n’a de toute façon pas attendu sa disparition pour confier les nouveaux albums d’Astérix à d’autres. Et son nouveau dessinateur Didier Conrad avoue d’ailleurs à quel point sa tâche est difficile… Mais Uderzo avait bien compris que son personnage lui survivrait, car comme toutes les légendes de la pop culture, Astérix appartient désormais à tout le monde.
Uderzo, sur le divan d'Astérix, une Création Documentaire disponible sur CANAL+.