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ONODA , Prix Louis Delluc 2022

Posté par Renaud Villain le 13 janvier 2022

A l’occasion du Prix Louis Delluc accordé au film d’Arthur Harari, « Onoda », retour sur une interview cannoise où le film faisait l’ouverture de la section « Un Certain Regard ». Arhur Hariri était déjà l’auteur d’un autre film remarqué, 4 ans auparavant : « Diamant noir » prix du Syndicat Français de la Critique, nommé au César de la Meilleure première œuvre et César du meilleur jeune espoir masculin attribué à Niels Schneider en 2017.

Nous rencontrons le réalisateur dans une chambre d’hôtel modeste, sur un balcon ensoleillé par cette chaude journée de juillet. Arthur Harari est un jeune trentenaire, très calme et posé. Il nous explique tout d’abord la genèse de son projet :

« J’ai discuté avec mon père un soir. Je cherchais un récit d’aventure et sans vraiment trop y croire, il m’a dit : « Tu n’as qu’à t’intéresser à ce Japonais qui est resté des années sur une île ». Je ne connaissais pas cette histoire donc j’ai été voir sur internet… J’ai lu quelques informations sur wikipedia qui est vraiment un endroit fascinant (rire). Et c’est comme ça que j’ai rencontré cette histoire-là. »

Une histoire vraie étonnante mais qui n’est pas pourtant "réelle", comme nous l’explique Arthur Harari : 

« Tout est fictionnel dans cette histoire, même si elle est arrivée : c’est trop fou pour être juste vrai ! Pour moi le rapport du vrai et du faux dans ce film est entremêlé et surtout j’ai traité ça comme une fiction, c’est-à-dire que ce personnage qui a existé je ne l’ai jamais rencontré donc je l’ai inventé. Onoda était un personnage qui avait une part de rebelle en lui, qui m’a intéressée et que j’ai écrite comme j’avais envie de l’écrire. Pour être doué pour survivre il faut déjà ne pas vouloir mourir et c’est à une époque où on revendique beaucoup le fait qu’on est prêt à mourir pour le Japon à cette période-là. Il y a une forme d’injonction au sacrifice. Lui c’est un personnage qui doit se sacrifier mais sans mourir. C’est cette espèce de marge presque paradoxale qui l’amène au bord d’une forme de folie. »

Le soldat portraituré par le cinéaste a passé 10 000 nuits dans une jungle aux Philippines, soit plus de 27 ans à se cacher, mener des opérations commandos dérisoires et souffrir de la faim, de la solitude et des conditions climatiques. Pourtant, dès 1944, il avait pris connaissance d’informations comme quoi le Japon avait capitulé. Mais il n’y avait pas cru. L’utilisation de la « Fake news » ne date pas d’hier et justement, c’était troublant pour le réalisateur d’écrire son scénario en pleine époque trumpienne :  

« L’histoire des « Fake news », de l’élection de Donald Trump et la manière dont Trump manipulait la question de l’information, c’est arrivé pendant l’écriture du scénario et je me suis dit « il y a quelque chose là-dedans qui fait écho de manière évidente ». Mais c’était dans l’histoire originelle en fait. Ca transpirait de l’histoire elle-même. Ce que je pense profondément c’est que les effets les plus forts de la contemporanéité en général sont des réactivations de choses anciennes qui ont à voir avec les choses un peu ancestrales de l’humanité. Cette question de la paranoïa ou de refus du réel, c’est l’allégorie de la caverne de Platon, on n’a pas attendu le XXIème siècle. Par contre la manière dont ça figurait dans le scénario, d’un coup, d’une manière presque brutale me renvoyait à aujourd’hui, ça c’est vrai. En réalité, moi, je l’ai toujours vu comme une espèce de conte ou de fable qui rejoignait des récits un peu primitifs. Je pense que c’est compliqué de ne pas penser à Don Quichotte, à Ulysse ou à Robinson.»

« Onoda » de Arthur Harari n’a pas eu le succès en salle qu’il aurait mérité. Sorti le 21 juillet et après 12 semaines d’exploitation, il n’a fait que 45 521 entrées (Source Allôciné). Appelons de nos vœux une ressortie auréolée de ce prix Louis Delluc. Arthur Harari, comme il nous l’avait confié, souhaiterait également qu’un distributeur audacieux lui permette de voir enfin « La condition de l’homme », une trilogie de 579 minutes (plus de 9 heures !) du Japonais de Masaki Kobayashi, sommet du désenchantement du Japon militariste de la seconde guerre mondiale, sorti en 1959.  

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